‘’ L’un de mes petits-enfants a dit à ses parents que Papi et Mami son mauvais… ils ont volé ‘’ Le témoignage émouvant de Mebe Ngo’o à la barre
Devant la barre du Tribunal Criminel Spécial, l’ancien
Ministre de la Défense du Cameroun a servi un témoignage émouvant. Revendiquant
son innocence ainsi que celle de sa femme incarcéré en même temps que lui à
Kondengui, Edgar Mebe Ngo’o déplore la façon dont son nom a été trainé dans la
boue.
Accusé de corruption
aggravé et de détournement de deniers publics, Edgar Mebe Ngo attend toujours d’être
fixé sur son sort.
Le procès renvoyé plus d’une dizaine de fois a repris, et la diffusion de son
patrimoine devant la Cour enfonce sérieusement l’ancien baron du régime d’Etoudi.
Cependant devant le
juge, Edgar Mebe Ngo’o soutient toujours qu’il est innocent, et dénonce une
cabale ourdie contrAe sa famille :
Afripulse vous propose un extrait de son témoignage :
Il m’a semblé
utile qu’à l’entame de cette phase de jugement que je vous dise que de par mon
éducation, ma formation et les responsabilités qu’il m’a été donné d’assumer
par le passé […] j’ai toujours été et demeure respectueux des institutions de
la République. J’aimerais, que cela soit su, que nul n’en ignore.
Naturellement, je respecte les institutions républicaines, la Justice comprise.
Je tiens par ailleurs à faire savoir que j’ai toujours été et demeure
déferrent, fidèle, loyal et attaché à la personne du président de la
République, son excellence Paul Biya, qui incarne ces institutions.
Je mentionne au passage [que] j’ai toujours essayé en plus de ce respect, à
travers les responsabilités que j’ai assumées, de participer à la protection de
ces institutions. C’est notamment la raison pour laquelle presque depuis deux
ans que mon épouse et moi sommes en détention, nous avons mis un point
d’honneur, d’une part, à obtempérer silencieux et stoïques à toutes les
injonctions et réquisitions de la Justice, et, d’autre part, à montrer
l’exemple que nul n’est au-dessus de la loi.
Mais Mme la présidente, je manquerai à mon devoir de sincérité vis-à-vis du
tribunal, honorables membres qui président la collégialité, si je ne vous
disais pas que je suis perplexe. Je précise que la perplexité c’est lorsqu’on
se pose des questions auxquelles on a du mal à trouver des réponses. Ça c’est
peut-être en off. Je n’ai pas à exprimer des jugements de valeur. Je suis
perplexe face à certaines péripéties qui ont émaillé cette procédure
judiciaire. Je ne citerai pas toutes, ce n’est pas le lieu. Ça, j’y reviendrai
sans doute.
Entre le 4 février, et le 11 mars 2019, date à laquelle on a été placés en détention,
mon épouse et moi (d’autres accusés l’ont été bien après), nous avons été
séquestrés à notre résidence à Odza. Assignés de fait en résidence surveillée.
Cette mesure ne fait plus partie de notre ordonnancement juridique.
Nous avons été assignés à résidence surveillée par un impressionnant dispositif
de sécurité. 70 éléments de sécurité équipés de 4X4 de combat, d’armes lourdes.
Des armes de guerres. Quand je parle d’armes de guerre, je sais de quoi je
parle. Le dispositif de sécurité a été installé dans tout le périmètre du
domicile. Ce que je veux mettre en exergue, c’est l’atteinte inadmissible au
sacrosaint principe de la présomption d’innocence.
Je voudrais vous dire comme vous pouvez imaginer, cette mise en scène était de
notoriété publique dans l’opinion nationale et internationale. Une chaine de
télévision est venue faire un reportage, repris dans la presse et sur les
réseaux sociaux. Depuis cette date, nous sommes déjà condamnés. Mieux, avant le
début de l’enquête préliminaire, nous étions déjà condamnés. Je suis grand-père
de huit petits-enfants. L’un a dit à ses parents qu’il ne veut plus venir dans
mon domicile. Les visites étaient soumises aux règles drastiques. Puisqu’il
porte mon nom, il a dit à son père que Mami et Papi mbombo sont trop mauvais
parce qu’ils ont volé. Il n’a que quatre ans ! Ça lui a été dit par sa
maitresse à l’école.
Madame la présidente, nous avons été mis en détention sur la base d’une
correspondance tronquée et mensongère de l’ANlF : l’Agence nationale des
investigations financières ; le service de renseignement financier. Conclusion
partielle. Ayant foi en nos institutions, nous éprouvons un sentiment
d’insécurité judiciaire doublé d’acharnement, traité avec beaucoup
d’inhumanité. Deux exemples.
Lorsque mon épouse rejoint la prison le 11 mars 2019, on la sort d’une clinique
de la place manu militari par les éléments du GSO [Groupement spécial
d’opération, ndlr], puisque j’ai été Dgsn [Délégué général à la Sureté
nationale, ndlr). On lui arrache les perfusions. On la ramène en prison où elle
a failli décéder. J’ai la suite, ayant été une des premières victimes du
covid-19, elle a été hospitalisée à l’Hôpital central de Yaoundé. Au dixième
jour, on l’a déclarée négative, pendant qu’elle entendait, profiter pour effectuer
des soins suite à une démiurgie qu’elle a subie à Paris, le même manège s’est
produit cette fois avec les agents pénitenciers. On l’a sortie de l’hôpital
manu militari. On l’a conduite à la prison et brutalisée. Nous apprendrons plus
tard qu’elle a tenté de s’évader. Une malade qui va avec les béquilles s’évade
?
Pour ma part, j’ai échappé à deux tentatives d’assassinat. Je sais de quoi je
parle. La première fois, c’était lors des émeutes en prison en juillet 2019. La
deuxième fois, le 4 février 2021. Si j’ai échappé à ‘la mort, c’est par la
volonté indépendante à mes assaillants.
Les infractions qui me sont reprochées sont supposées avoir été commises du
temps où j’exerçais les fonctions de ministre délégué à la présidence en charge
de la Défense. Je ne vous apprends rien en disant que la majorité des activités
de cette administration, de ce département ministériel, sont protégées par le
secret défense. Ce secret défense concerne les informations, les
renseignements, procédés à caractère militaire, d’origine gouvernementale ou
diplomatique dont la divulgation auprès des personnes non autorisées peut
nuire, hypothéquer et remettre en cause la défense nationale. Naturellement, je
ne suis plus ministre délégué à la présidence en charge de la Défense, mais je
demeure astreint à l’observation de cette obligation.
Toutefois, par respect pour le tribunal qui rend la Justice au non du peuple
camerounais, par respect pour votre auguste juridiction, pour vous honorables
membres de la collégialité, j’ai choisi de répondre aux questions qui me seront
posées. Mais madame la présidente, je le ferais dans la limite des contraintes
que m’impose cette obligation.
Je terminerais par une doléance, -celle de solliciter l’indulgence et la
compréhension du tribunal si je reste circonspect, nuancé sur les questions qui
me seront posées et si je ne réponds pas à certaines de vos questions.
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